Je suis celle qu’on entend pas,
Je suis celle qu’on ne voit pas,
Je suis cachée au bord des larmes,
Je suis la Reine des Drames
Pomme (Anxiété)
Ta tête a l’âme en peine elle aime se lamenter
Je suis ta gangrène tu es hanté
Je suis plantée chez toi rentrée
Mon couteau est tranchant j’en veux à ta santé
(…)
Je voulais de l’excitant
Je suis mort en existant
Casey (Ausgang -Gangrène)
Elle peut se montrer sournoise, discrète, la plupart du temps c’est de cette manière qu’elle agit, elle oeuvre en secret, au plus profond de l’être.
Souvent invisible, parfois même insoupçonnable de l’extérieur, soigneusement camouflée par celui.elle en qui elle fait son oeuvre en toute discrétion.
Le masque est opaque et le costume, insidieux, se décline sous de multiples formes.
Un immense sourire ou une allure impeccable.
Une nature joviale et active à l’extrême ou un besoin d’action permanent.
Parfois ce costume prends la forme d’un besoin de cultiver et de se perdre dans des habitudes.
Presque toujours nourrie par la machine routinière de nos quotidiens de mortels.
Entretenue ainsi dans un cercle perfide.
En prendre conscience peut nous mettre à terre, nous accabler jusqu’au point de non retour.
C’est à ce moment là que se produisent les drames.
Nous avons tous en nous une part sombre, un orage intérieur.
Cette part d’ombre, anxiété, dépression, se développe et prend une place plus ou moins importantes selon les individus, des épreuves et des étapes de la vie.
Ma dépression à moi se trouve tapie dans un coin de ma tête.
C’est un nuage noir, elle en a les caractéristiques : de calme et discret, presque inexistant, il peut devenir soudainement énorme et menaçant, développant alors tout son potentiel orageux et obscur.
J’ai mis du temps, beaucoup de temps, mais j’ai appris à l’apprivoiser, à faire en sorte qu’il reste un petit nuage noir, jamais blanc et moutonneux, jamais complètement inoffensif : la juste dose de lucidité et d’angoisses nécessaire à mon équilibre et à ma pleine conscience de l’existence, de la valeur de la vie, de l’amour et des êtres.
Atteindre ce calme a été une longue aventure, faite de nombreuses étapes et de multiples épisodes.
Mon nuage noir à moi avait régulièrement tendance à s’étirer dans ma tête, se déployant jusqu’à ma gorge et ma poitrine, envahissant de ses ténèbres mes fonctions cognitives et vitales qui se trouvaient alors figées, bloquées dans un étau de noirceur.
Dans ces moments là, l’expression « broyer du noir », qui prenait tout son sens, me venait systématiquement à l’esprit.
J’avais la sensation que mon cerveau se transformait en machine à broyer « du noir », je me laissais envahir puis broyer par mon nuage noir, sans avoir ni la force ni la volonté de cesser d’alimenter la machine, entretenant ainsi cet engrenage.
Ma dépression à moi n’est pas spectaculaire.
Non, la mienne est de celles qui oeuvrent en toute discrétion.
Celles qui oeuvrent derrière le masque.
Continuer d’avancer, toujours. Sourire, s’apprêter, se maquiller : toujours. Se laisser aller : jamais. Ne jamais tomber le masque.
C’est à l’intérieur et à l’abri des regards que la tempête faisait rage, que les larmes coulaient en silence.
Et la machine broyait.
Jour et nuit.
Produisant des pensées négatives en boucle sans cesse renouvelées.
L’auto-dénigrement était le moteur de cette machine, la culpabilité et la peur ses carburants.
Florilège :
Tout parait inutile et vain.
Vous avez l’impression de brasser du vent car la vie elle même parait inutile et vaine. Rien a de sens, rien a de but si ce n’est celui d’avancer vers la fin, la fin du jeu, la fin de tout.
Vous avez l’impression de continuer à avancer seulement parce qu’il le faut.
Alors vous donnez le change, tant que c’est possible.
Chaque matin revêtue de votre costume de celui.elle « qui gère » et de votre masque de sourire, vous donnez le change.
Parce qu’en réalité, vous vous sentez complètement nulle, bidon, inutile, moins que rien, incompétente à tenir tous les rôles de votre vie.
Une mauvaise mère.
Une mauvaise compagne.
Une fille ingrate et une amie indigne.
Une chanteuse en toc.
Une Assistante à la fois rongée par l’ennui et dévorée par la culpabilité d’être inutile… c’est forcément de ma faute, on me laisse végéter car on ne me fait pas confiance, on me trouve incompétente, c’est à moi de me prendre en main, mais je ne suis bonne à rien…
Un ennui qui laisse tout le temps à vos pensées noires de se cultiver à l’infini, à vos névroses de prendre toute la place, jusqu’à vous habiter complètement.
Un sentiment de solitude immense, un vide impossible à combler, même entourée vous vous sentez seule à crever.
Culpabilité de se sentir si mal, de détester la vie alors même qu’elle vous a tout donné, à commencer par des parents aimant, une enfance heureuse et équilibrée, puis l’homme de votre vie qui vous comble de son amour et sa présence de chaque instant, et ensuite un petit garçon intelligent et en pleine santé.
Mais vous ne le méritez pas.
Vous ne méritez pas tout ça, ni tout l’amour qu’on vous porte.
Vous êtes si nulle, si mauvaise.
Et d’ailleurs tout le monde serait bien mieux sans vous.
C’est la conclusion ultime et systématique produite par la machine à broyer.
Je ne me sentais jamais à la bonne place, au bon endroit, j’avais l’impression d’être à côté de ma vie. De vivre une vie qui n’était pas pour moi, en parfaite usurpatrice.
Chaque épisode orageux se terminait invariablement de la même manière : au bout de plusieurs mois je finissais par me faire prescrire une dose minimale d’antidépresseur qui suffisait à faire s’éclaircir progressivement mon horizon et reléguait alors mon nuage à sa juste place, sans le faire complètement disparaître.
La dernière fois c’était en septembre 2017, il y a 3 ans : 5mg de Seroplex que je prends toujours à l’heure ou j’écris ces lignes et qui sera, je pense, ma béquille pour longtemps.
J’ai longtemps chercher comprendre. Je voulais comprendre pourquoi.
Pourquoi mon nuage avait tendance à m’envahir de la sorte.
Je voulais avoir une cause concrète à traiter, un responsable à condamner, que ce soit une personne physique, un événement, un traumatisme enfoui dans mon inconscient.
En fait cela ne faisait qu’aggraver ma culpabilité.
Parce qu’il n’y avait tout simplement rien.
Ni violence ni traumatisme, ni parent défaillant.
RIEN.
Alors, j’ai recommencé à voir un psy et avec son aide j’ai remis tous les compteurs à zéro. J’ai arrêté de chercher un coupable ou une cause lointaine et commencé une vraie introspection, non plus pour rechercher pourquoi mais plutôt pour comprendre comment.
J’ai tout d’abord intégré et accepté que j’étais juste née comme ça, avec un nuage noir un peu capricieux, et accepté l’idée que sans une béquille chimique à long terme je ne parviendrai jamais à trouver un équilibre durable.
Ainsi soutenue, j’ai identifié et agit sur plusieurs leviers de mon mal-être pour les traiter durablement, à commencer par mon trouble du comportement alimentaire, mon obsession de la minceur, et ses causes à elle (voir ICI).
Ce fût alors le commencement d’un cercle vertueux.
J’ai complètement lâché prise, laissé tomber le masque, j’ai compris que pour vivre dans cette vie qui était bien la mienne, je devais avant tout être moi-même.
J’ai modifié mes habitudes, j’ai coupé court à toutes relations toxiques, j’ai arrêté de me contraindre, j’ai commencé à porter un autre regard sur moi même, j’ai appris l’auto-bienveillance et avec elle est arrivée cette grande absente de ma vie jusqu’alors : la confiance en moi (VOIR ICI).
J’ai lu beaucoup, un peu de tout.
Alors que j’avais l’habitude de lire « à temps perdus », la lecture est devenue une activité à part entière. Les vendredi après midi passés à la salle de sport ou à courir partout ont fait place à des temps de repos et de lecture, plongée dans le silence.
J’ai appris à apprécier le silence, ce silence que j’avais toujours eu tendance à vouloir combler à tout prix, je m’y suis retrouvée.
Cela m’a aidé à me pauser et à me reposer tout en gardant l’esprit affûté.
J’ai ouvert mon esprit, amorcé une déconstruction.
J’ai arrêté de juger, et cela je m’a aidé à me libérer moi même du jugement et du poids du regard des autres.
Je me suis nourrie d’autres expériences, d’autres témoignages.
J’ai compris que le seul amour qui me manquait, c’était le mien.
Dis comme cela ça paraît extrêmement simpliste, ça ressemble à une formule magique, si facile à dire !
J’ai vécue jusqu’à presque 42 ans dans cette alternance de tempêtes et éclaircies et chaque orage me terrassait un peu plus puissamment. Je n’avais plus envie de continuer ainsi. J’ai ressenti que c’était le moment de me donner cette chance, cette possibilité de profiter de chaque moment de la vie qui me reste à vivre, sans plus en perdre un instant. Parce que malgré tout j’ai toujours eu une conscience aiguë de la beauté de la vie et de tout ce qui la compose.
En réalité, désolée de vous le dire si vous en cherchiez une en me lisant, mais je n’ai pas de formule magique ni de méthode à vous dévoiler.
Je ne crois pas aux méthodes magiques vendues par les coachs « de vie »
Ce texte, comme tous ceux que j’écris, n’a valeur que de témoignage, de récit.
Je crois vraiment que la solution est en nous et qu’aucune formule magique ne sera jamais plus efficace que celle que l’on compose pour nous-même et que l’on applique bon moment.
Notes : J’ai choisi cette photo de 2014 pas seulement parce que c’est une très belle photo ( http://blissphotographie.com/), mais parce que quand je la regarde je me souviens parfaitement de la tempête qui faisait rage en moi à ce moment précis. Et si je plonge dans mon regard, je pourrais presque l’apercevoir…
Et si vous ne connaissez pas cette chanson de Pomme, la voici, elle est l’Anxiété mise en mots, en mélodie et en images. Cette chanson m’a immédiatement parlé tant elle représentait parfaitement ce que j’ai pu ressentir pendant tant d’années.
Simple et parlant 😉à méditer chacun à son niveau 🤗
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