L’épreuve du short

Depuis déjà plusieurs semaines il est là, il met nos sorts de confinés au défi et nous nargue depuis l’extérieur de son éblouissante lumière et de son intense chaleur sans l’ombre d’un nuage à l’horizon. Cette année il est bel et bien au rendez vous, le printemps, un vrai printemps lumineux et ensoleillé. C’en est presque indécent !

Pour beaucoup d’entre nous, il y a une transition vestimentaire particulièrement difficile à faire à cette époque de l’année… vous voyez ce que je veux dire non ? Oui oui vous voyez très bien de quoi je veux parler… du fameux passage de la garde robe d’hiver à celle d’été.
Enfin, de l’été dernier.
Oui parce que vous avez remarquez qu’il nous prend toujours par surprise le fourbe, un beau jour on se rend compte qu’on crève de chaud dans son jean alors que la veille encore on reluquait en grelotant les vitrines et la nouvelle collec’ d’un oeil incrédule en se disant que les robes légères et autres short pouvaient bien attendre, ce serait pour plus tard…

Et puis finalement comme chaque année on se retrouve à exhumer le short ou la petite robe de l’année dernière du fin fond de son dressing ou armoire. Short, jupe ou petite robe que donc, cela va de soi, on n’a pas enfilé depuis plusieurs longs mois…

Personnellement j’ai vécu cette transition entre mes ces 2 « garde-robes » comme une véritable épreuve pendant des années.
Et je ne pense pas être la seule… voici comment ça se passait.

Etape 1 : l’essayage

L’épreuve en question se déroule en plusieurs étapes : celle du premier essayage tout d’abord.
Le verdict sans appel qui rendu par la taille du short en question et qui nous fera regretter ou non les raclettes, tartiflettes et autres plats réconfortants de l’hiver.
Angoisse aussi irrationnelle qu’inexplicable pour ma part puisque les plats réconfortants de l’hivers je me contentais généralement de les regarder ou de les picorer du bout des lèvres et au pire, si vraiment je devais « y passer » ils étaient immédiatement éliminés par un redoublement de séances de sport et une diet hyper stricte dès le lendemain.
Et pourtant, l’angoisse se répétait d’années en années à la même époque: et elle commençait dès vue du short en question, je le trouvais toujours minuscule il y avait un décalage énorme entre la sensation que j’avais de mon corps et l’idée que je me faisais de la taille de ce short. Pour dire les choses simplement : la vue de ce short me donnais instantanément la sensation d’avoir un cul énorme.
Dans des moments comme ceux ci je la ressentais comme jamais cette peur irrationnelle, ma plus grande peur, celle d’une prise de poids aussi inexpliquée d’incontrôlable : la grossophobie, au premier degré.

Etape 2 : l’épreuve du miroir

Cette étape passée, avec plus ou moins de « réussite », la suivante consiste à apprivoiser la sensation et l’image renvoyée dans le miroir de certaines parties de son corps pendant des mois entièrement couvertes, bien cachées, bien à l’abris de tous regard et de tous jugements extérieurs. Se familiariser à nouveau avec la sensation de porter un vêtement qui laisse apparaître des parties de son corps que l’on ne montre pas avec spécialement d’enthousiasme mais bien parce qu’il fait trop chaud pour faire autrement. Vous savez celles que l’on dénigre, que l’on ne juge pas assez dans la norme, pas assez belles, trop imparfaites, trop loin des standards « acceptables » pour être montrées.

Etape 3 : affronter les regards

Et puis la dernière étape, celle d’exposer lesdites parties auto-dénigrées ci dessus au regard d’autrui. Etape qui finalement s’avère toujours moins difficile que l’idée que l’on s’en faisait. Pourquoi ? Parce que le regard le moins bienveillant est souvent celui qu’on se porte à soi même.
Ah ben oui tient, finalement je sors avec mon short (jupette, robette) et personne ne s’évanouit de peur ou de dégoût sur mon passage, point de regard horrifié sur mon cuissot palot et dénudé… par contre… oh bonheur de sentir l’air sur ma peau !

Etape…. Allez, venez, on s’en fout, on s’aime, on vit et puis c’est tout !

J’ai passé mes étés d’ado et de jeune adulte en jean ou jupes longues tellement j’étais complexée par mes jambes et mes cuisses pour diverses raisons (trop courtes, trop molles, pas assez fines, pas assez fermes, jamais assez bien épilées).
Si bien que depuis que, libérée partiellement de ce complexe, j’ai découvert la sensation de bien être procurée par le port du short en période estivale, impossible de me faire remettre un pantalon entre juin et septembre !

Durant cette période : jupette, robette ou shorts de rigueur, et aujourd’hui plus que jamais tant pis pour les jambes pas assez lisse, trop blanches, les cuisses trop molles, la cellulite, les poils incarnés, les poils tout court, les petites varices, les cicatrices…

Je suis comme je suis, et je suis libre.

Cette année même le passage entre les deux gardes robes n’a pas été une épreuve. Parce que j’ai changé de point de vue sur moi même et sur l’importance démesurée que j’accordais à mon image, parce que j’ai appris à être bienveillante envers moi-même.

Je me suis dit, même si le petit short de l’année dernière est devenu trop petit, j’irais en acheter un autre à ma taille mais en tous cas je n’ai rien à regretter, aucun bons plats réconfortants de l’hiver, apéro en tête à tête ou entre amis et after-work entre collègues, soirée entre meufs, tant de bons moments d’épicurisme et de partage vécus en pleine conscience et sans culpabilité, qui font que la vie est si belle…

Serais-je sensée regretter tout cela pour seulement quoi ? Une image ? Une image qui ne correspondrait pas à des standards normalisés que je me suis laissée imposer pendant tant d’années ? Un modèle imposée par la « Diet Culture » et une société grossophobe ? Une image de perfection inatteignable.
Un combat inutile et sans fin car nos corps changent et évoluent avec nos vies et vouloir garder le contrôle à tout prix conduit irrémédiablement à une obsession qui nous gâche la vie…

En tous cas tout cela est fini pour moi !
Meufs, soyons fières de la diversité de nos corps, formidables machines de vies qui nous permettent de profiter de tout ce qu’il y a de meilleur à vivre !

Soyons nous-même !

Une réflexion sur “L’épreuve du short

  1. Encore un très bel article..
    Des questionnements qui hélas nous obdedent toujours….. L âge étant aussi un facteur non négligeable…et ce « corps » cet alien… difficilement apprivoisable qui nous joue des tours…
    Mais vive la vie..💋🥰

    Aimé par 1 personne

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