Fanitude – Chapitre 1

Ma musique, Mes Idoles #1

Quand on se met à penser à la diversité et à l’immensité de l’univers musical, on se dit qu’on n’aurait jamais assez d’une vie pour faire le tour. Je sais pas vous mais moi, c’est l’une de mes grandes frustrations.
J’aimerais « avoir le temps » d’écouter une plus grande variété de musique, de cultiver d’avantage mes connaissances musicales.

Mais soyons honnêtes, même si la volonté de culture est là, écouter de la musique est avant tout un plaisir et notre choix d’écoute n’est jamais guidé par cette seule volonté… On a toujours tendance à se diriger d’instinct vers ce qui nous plait vraiment d’une part, et vers se qui correspond à l’humeur du moment et ensuite.
Et finalement, même si aujourd’hui (quelle chance nous avons !) les plateformes de streaming nous permettent de diversifier facilement notre écoute, on a tendance à se diriger toujours vers les mêmes « styles » et de ne jamais réellement sortir de notre « zone de confort ».

Pour ce qui me concerne ma zone de confort « centrale » est composée de quelques styles : Soul, Funk, R&B des années 90 (surement parce que c’est le son mes 20 ans).
Mais ma zone de confort « périphérique » est beaucoup plus large : Jazz Rock, Blues Rock, Rock des 70’s, Reggae, Pop et Pop Urbaine, Electro et Dance (pour danser, faire du sport ou me donner la pêche !).

Comme j’aime bien rester connectée à mon époque, (quand on a un ado à la maison c’est plutôt recommandé), je clique très souvent sur « hits du moment » et je laisse faire. Cela me permet de faire de belles découvertes, d’élargir ma zone de confort, et en bonus de partager de bons moments avec mon fiston.

J’assume complètement de prendre du plaisir à écouter de la musique jugée trop « commerciale ».
Que ce ne soit pas « de la vraie musique », que la composition, la production ou les textes soit jugés trop « pauvres » ou « basiques »est clairement le dernier de mes soucis.
Tout ce qui m’importe c’est l’émotion qu’elle me procure.
Vous avez remarqué comme par exemple certaines chanson vous procure une irrésistible envie de danser ou vous mettent immédiatement de bonne humeur ?
Comme certaines au contraire, vous serrent le coeur ou vous font monter les larmes aux yeux ?
Parfois ce sont des émotions plus complexes, plus difficile à décrire ou même à expliquer avec des mots.

Pour moi, la musique, quelle qu’elle soit, s’écoute bien sûr, mais avant tout se ressent.

C’est l’émotion que nous procure son écoute qui fait qu’on a envie d’entendre un morceau encore et encore, et le fait que cette émotion se reproduise de manière aussi intense à chaque écoute produit même parfois un phénomène addictif.

Avouez qu’il y a des albums ou des morceaux que vous adorez réécouter, et qui vous procurent toujours autant d’émotions que la toute première fois, voir plus parce que c’est un peu comme si au fil du temps c’était devenu une part de vous même, de votre histoire.

Il y a deux artistes dont les discographies font intégralement partie de mon histoire, avec lesquels j’ai grandi, j’ai « construite » mon oreille.
Mes deux idoles entre toutes.
Indétrônables, irremplaçables pour toujours et à jamais ! Amen.

Whitney

Qu’est ce que je me sens mal à l’aise dans ce justaucorps, j’ai l’impression qu’il me boudine le ventre, ah et puis ce collant bleu turquoise, je le déteste il me colle beaucoup trop…les autres filles ont tellement d’allure, et elles sont tellement plus grandes…
Et comment fait cette… Natacha ? Barbara ? pour que ses cheveux soient toujours aussi lisses et brillants…
Bon je me mets devant sinon je vois pas la prof et j’arrive pas à suivre… ah elle arrive, la prof, Nadine, ce qu’elle est belle…
Elle appuie sur play, vient se placer devant le miroir en trottinant avec élégance et…
Aaaaah cette chanson, mais cette chanson !!!! Qu’est ce que je l’ADORE !!!

La seule et unique année ou j’ai pratiqué la danse, ma prof Nadine commençait toujours la séance d’échauffements de ce cours de « modern jazz » par la même chanson. Une chanson « pop » en anglais, au rythme entraînant et gai, portée par une voix chaude, lumineuse, et puissante.

Dès les premières notes, je m’en souviens comme si c’était hier, mon état d’esprit changeait instantanément, je me regardais dans le miroir et tous mes doutes s’envolaient, tant pis pour le bidou boudinné, tant pis pour le collant moche, tant pis pour les cheveux qui frisottent…
J’avais juste envie de danser, comme si plus rien n’existait que moi, ce rythme et CETTE VOIX magique !!!

Et puis j’ai arrêté la danse et cette chanson s’est rangée dans un coin de ma tête.

Il faut savoir que quand j’étais enfant j’habitais en périphérie d’une ville moyenne. Une des passions de mon père à l’époque était de partir en excursion dans les bois voisins pour y glaner non pas des champignons mais des objets abandonnés et encore utilisables (à la fin des années 80, âge d’or de la surconsommation, il n’était pas rare que les gens se débarrassent de toutes sortes de choses dans les bois sans aucune conscience écologique, juste parcequ’ils n’en voulaient plus chez eux).
Ce faisant, il n’était pas rare qu’il tombe sur des sacs ou bagages volés qu’il ramenait alors aux propriétaires si ceux ci étaient identifiables.

L’idée d’utiliser des choses abandonnés dans les bois par des gens inconnus ne m’emballait guère et les butins de ces chasses aux trésors paternelles ne m’intéressait que de très loin.
Ce hobby lui valait d’ailleurs d’être la cible de gentilles mais fréquentes moqueries de la part des tout jeunes ados que nous étions alors, mon frère et moi.

Mais un jour de l’année 1988, mon année de 6eme, il est revenu avec quelques objets, vraisemblablement le contenu abandonné d’une voiture volée, et parmi ceux-ci une cassette audio à la jaquette bleue qu’il a laissé choir sur la table de la cuisine en lançant à la cantonade, s’adressant à la fois à ma mère et moi qui étions toutes les deux dans la pièce : « Tiens, y avait ça ! Vous écouterez si ça vous plait ».

J’ai regardé la chose d’un oeil morne et sans conviction, persuadée de trouver sous mes yeux une vieille cassette de musette ou de variété française des 60’s… mais en y regardant de plus près, le graphisme de la jaquette bleu, la photo de cette jeune femme noire au sourire lumineux et au regard pétillant, resplendissante dans un simple débardeur blanc ressemblaient à quelque chose de beaucoup plus moderne. « Whitney », annonçait simplement la couverture de la jaquette. J’ai retourné le boîtier à la recherche d’une indication d’ordre chronologique : 1987. Moderne, et même récent. Ce nom me disait en effet vaguement quelque chose…

Ce qui était bien chez nous c’est qu’il y avait toujours à porté de main un appareil quelconque pour écouter de la musique : poste radio, radio-cassettes, tourne-disque…
Cela aussi nous le devions à la double passion de mon père pour la récup et les réparations en tous genres, et je dois bien avouer que dans ce cas précis, ça nous arrangeait bien !

J’ai ouvert le boîtier en espérant que la cassette serait dedans et en bon état, ce qui était le cas.

Mon niveau de curiosité avait atteint son seuil d’alerte maximum : vite vite, un poste à cassettes, vite vite, face A, PLAY !

Et là comment vous décrire ce que j’ai ressenti en entendant les premiers sons, les premières notes, les premiers mots de la première chanson…
« Come on dance« , avec la vague impression que cette invitation m’était personnellement destinée, je me suis sentie rougir de bonheur : c’était MA chanson, celle des cours de danse, celle qui me mettait du baume au coeur, balayait les pensées négatives et me donnait une irrésistible envie de bouger mon corps !!!

« Oooooh I wanna dance with somebody, I wanna feel the beat with somebody… »

J’ai déplié la jaquette : outre une autre superbe photo en noir et blanc de la chanteuse, elle contenait les paroles de toutes les chansons. Oh joie, Oh bonheur j’allais pouvoir CHANTER !!!!

Et ça pour chanter les chansons de Whitney je les ai chanté… pendant des années et des années, toute ma famille peut en témoigner (sans doute même le voisinage et les promeneurs qui passaient à proximité). D’autant que, si vous connaissez ma voix, vous imaginez à quel point le répertoire de Whitney est éloigné de ma tessiture, donc je vous laisse imaginer le carnage.
Peu m’importait à vrai dire quand j’écoutais Whitney, je vivais Whitney, je devenais Whitney, et quand je ne pouvais plus chanter parce que ma voix ne suivait plus, je passais en mode play-back et continuais à vivre ma star comme si elle m’habitait !
J’ai usé la bande de la cassette à la jaquette bleue à force de l’écouter en boucle, puis je me suis faite offrir son album suivant « I’m Youre Baby Tonight » dont j’avais attendu fébrilement la sortie. J’étais alors en 4eme et même si la Diva était assez peu connue des ados de mon age, j’assumais complètement cette « fanitude » qui me donnait même une sensation d’exclusivité qui n’était pas sans me déplaire.

Au lycée, je me suis procurée son tout premier album en CD (celui à la jaquette orangé, qui n’a pas de titre) que j’ai découvert et apprécié avec autant d’enthousiasme et de plaisir que si c’était une nouveauté.
Sa voix m’envoûtait et m’envoûte encore comme aucune autre, elle résonne en moi fait naître des émotions incomparables.

Et puis il y a eu le phénomène « Bodyguard » et son titre phare « I Will Always Love You ».

J’avoue que le sentiment que j’ai éprouvé alors n’était pas très éloigné de la jalousie en voyant ce déferlement de « soit disant » fans (que je jugeait pour ma part parfaitement illégitimes) me voler « MA Whitney ».
Moi qui avait été transportée par sa voix avant même de connaître son nom, qui l’avait suivie depuis mes 11 ans… Tous « ceux là » débarquaient et se prétendaient « fans » parcqu’ils avait vu un film et que seulement quelques mois auparavant ils ignoraient son existence.
Pour autant, cet épisode douloureux dans ma vie de fan n’a en rien amoindri l’amour infini que je portais à ma Star et j’ai continué à la suivre et a écouter sa musique avec autant de plaisir jusque dans ma vie d’adulte.

A 20 ans, lorsque j’ai eu la chance d’aller la voir se produire sur scène au Zénith de Paris j’avoue en avoir pleuré d’émotion.
J’ai réalisé après coup la chance que j’avais eu d’assister cette année là a l’une de ces dernières tournées « au top ».

Depuis quelques années les plateformes de streaming et les réseaux sociaux m’ont fait découvrir une multitude de performances que je ne connaissais pas et j’avoue que je suis toujours complètement subjuguée par ses performances en LIVE.
Pas une seule interprétation ne se ressemble, il y a a un travail artistique mais aussi une aisance incroyable dans sa maîtrise vocale, c’est presque surréaliste.
Elle joue « de sa voix » comme un virtuose le ferait de son instrument, avec une extrême fluidité et en osmose parfaite avec les musiciens.

Sa mort m’a moins étonnée qu’attristée, comme si au fond je savais (comme tous les fans) que ça devait fatalement arriver.
Une tristesse teintée de dégoût et de colère, comme le sentiment d’un immense gâchis.

Car malheureusement, le génie et le talent n’immunisent pas contre les failles et faiblesses, la sensibilité et les fêlures propres à chaque individu… Les artistes les plus fragiles, s’il ne sont pas épaulés par un entourage solide, se font souvent avalés et broyés par la machine impitoyable du star-system et de tous ses travers.

Ils continuent néanmoins d’exister à travers notre fanitude et l’oeuvre qu’ils nous laissent.
Quand je me suis aperçu que « I Will Always Love you » était dans la playlist « coup de coeur » de mon fils de 13 ans sur Deezer, j’en aurais presque eu la larme à l’oeil.

Dans le chapitre 2 je vous parlerais de ma deuxième plus grande Idole, une fanitude qui fut tout aussi immense mais que j’ai aujourd’hui plus de mal à assumer.

A suivre…

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