Choix professionnels, choix de vie…

Même si l’échéance approche, je ne suis pas encore concernée en tant que parent, mais tous ceux qui le sont pourront vous le confirmer : dans l’éducation d’un enfant le moment de l’orientation est une étape souvent compliquée à gérer, entraînant parfois la famille dans une zone de turbulences assez intenses.

En clair, c’est l’angoisse.

Les parents d’un côté, qui, ancrés dans la société, s’appuyant sur leur expérience de la vie, sont tiraillés entre leur souhait (et devoir) d’indiquer la voie la plus « confortable » en terme de qualité de vie future pour leur progéniture adorée, celle qui lui donnera dès le départ les « meilleurs » bagages pour un bon départ dans la vie, et celui de rester à l’écoute des souhaits et désirs de la progéniture en question.

Et c’est souvent là que le bât blesse.

Car les souhaits de l’adolescent chéri sont souvent d’avantage dictés à cet âge par une conviction intime et profonde, une envie ou une passion que par la réalisation d’un projet professionnel concret leur permettant d’accéder à un niveau de vie confortable.

Ce qui paraît finalement assez logique et terriblement lucide comme raisonnement.

Ne serait ce pas finalement normal, naturel, de pouvoir vivre de ce qui nous anime réellement, ce qui nous fait vraiment vibrer, ce qui nous donne « envie de nous lever le matin » ?

Car par la formule : qu’est ce que tu veux faire « dans la vie », on entend finalement qu’est ce que tu veux faire « de ta vie » ?
C’est en effet bien notre existence toute entière qui est conditionnée par ces choix d’orientation d’abord, puis nos choix professionnels ensuite. Rien n’est irréversible me direz vous, mais il s’agit là d’un choix qui a son importance.

Et a cette question, il serait bien logique que l’on réponde avec ce que l’on a dans les tripes, ce qui nous anime au plus profond, puisque c’est à cela que l’on va consacrer 80 % de nos existences.

Il y a quelque temps Christine Angot faisait « le buzz » en affirmant que choisir la voie artistique était souvent un plan B, un choix que l’on faisait à défaut de ne « pouvoir » faire autre chose (sous entendu n’avoir les capacités intellectuelles ou autres), et de fait, un constat d’échec.

https://www.ozap.com/actu/christine-angot-dans-onpc-etre-artiste-c-est-toujours-un-plan-b-le-resultat-d-un-echec/550914

WTF ? C’est ce que je me suis dit en visionnant cette séquence qui m’a particulièrement interpellée, pas tant parce que, se dénigrant elle même, Madame Angot dénigre tous les artistes en général (après tout, elle nous a habitué à ce type de contradiction), mais surtout parce que j’ai réalisé à quel point cette façon d’envisager les choses était l’opposition exacte de ce que je pensais.

Quand vous étiez petits vous rêviez d’être avocat vous ?
Bon allez, avocat, médecin, vétérinaire ou infirmière peut être… mais « travailler dans une entreprise » comme elle dit ?

Et bien je sais pas mais moi quand j’étais petite je rêvais d’être chanteuse, actrice, écrivaine, dessinatrice, styliste mais… surement pas dentiste, notaire ni agent administratif !

Elle fait vraisemblablement de son propre vécu une généralité.

Je pense personnellement que c’est plus souvent le contraire : quand on a une âme d’artiste, une passion artistique, le plan A c’est plutôt de pouvoir se réaliser dans l’exercice de cette passion quotidiennement et de pouvoir en vivre.

Et finalement on se tourne souvent vers le plan B, à savoir faire un choix de vie « raisonnable », celui qui nous permettra de payer les factures, vivre confortablement et s’insérer dans la société comme un bon petit produit du système capitaliste.

Bien sûr il y a des métiers « vocations » mais même ceux là semblent perdre toute l’essence de leur attractivité tant ils sont méprisés, malmenées et mal reconnus par cette société en question. Je pense en disant cela en particulier aux métiers de la santé et de l’éducation. Or, un métier « vocation » qui se transforme en désillusion c’est bien pire qu’un plan B, c’est un burn-out.

En réalité, on fait souvent ses choix d’orientation professionnels « par défaut » ou par élimination en se basant sur les critères pratiques ou financiers de l’instant T.
Pour dire les choses simplement il s’agit souvent d’avantage de choix de raison plus que de choix de coeur.

Mais peut être que je suis en train de faire comme Christine Angot, de mon propre vécu une généralité…

Car cela a souvent été l’un de mes grands regrets, à partir de la trentaine j’ai commencé à remettre en question mes choix professionnels, et en particulier le choix de mon métier. En effet, comme je le raconte ici https://toutesmesvies.com/2019/11/11/i-love-my-job-now/, je me suis souvent ennuyée dans les postes que j’ai occupés, et cela m’a souvent amené à remettre en question la façon et les raisons qui m’avaient menées sur cette voie.

To Be or not To be a teacher ?

Collégienne, mes deux matières préférées étaient l’Anglais (number one) et le Français (seconde place).
Dès le lycée j’ai choisi la voie littéraire. Je m’étais dit que, raisonnablement, la profession qui me conviendrait le mieux étant donné mon assez bon niveau et mon attrait pour la langue anglaise serait celle de professeur d’anglais.
La fac est un souvenir douloureux, je manquais sérieusement de maturité, je me suis sentie perdue, larguée, livrée à moi même, incapable de trouver seule une méthodologie de travail motivante et efficace. Cette unique année de Deug à l’Université Stendhal de Grenoble me laisse comme principal souvenir celui d’une errance physique et intellectuelle d’une dizaine de mois. Dix mois à l’issue desquels j’ai commencé à envoyer des dossiers d’inscription à des cursus courts, de type BAC +2, qui me permettraient non seulement de quitter le milieu universitaire qui ne semblait pas être conçu pour moi, d’entrer rapidement dans la vie active et d’accéder à ce qui alors m’apparaissait comme le Saint Graal à savoir l’indépendance financière.

J’ai candidaté et été reçue en BTS Tourisme et en BTS Assistant de Direction Bilingue et j’ai choisi ce dernier pour des raisons exclusivement pratiques et financières car en réalité je n’avais absolument aucune idée de ce en quoi consistait vraiment la profession sur laquelle elle aboutissait. L’intitulé contenait le terme « bilingue » et c’était à côté de chez moi : ces 2 critères, ainsi que l’état végétatif dans lequel se trouvait mes neurones à l’issue de mon année d’université ont suffit à me convaincre que ce BTS Assistant de Direction au Lycée Notre Dame des Victoires de Voiron était LE choix ultime.

J’ai souvent, très souvent repensé à cette période charnière « post bac », en particulier dans des moments ou mon activité professionnelle flirtait dangereusement avec le néant intersidéral.

Je me revois quittant l’université et me demande si abandonner pour un cursus court était vraiment la seule alternative ? Parfois je me dis que j’aurais dû m’accrocher d’avantage à mon projet initial mais en même temps je m’imagine avec peine lancée dans des études dont la durée aurait excédé 3 années post bac. Et en admettant que j’y sois parvenue, ma frêle assurance et mon mental fragile auraient ils survécus à une carrière d’enseignante ?

J’ai toutefois acquis la conviction que j’aurais dû me faire mieux conseiller, prendre plus de temps et consacrer plus d’énergie à la recherche de voies alternatives qui m’auraient convenues d’avantage.
Je pense que j’ai manqué de discernement à l’époque et que mon investissement n’était à la hauteur de l’enjeu. Mais j’avais le discernement de mes 18 ans et demi, je distinguais seulement les enjeux à court terme avec comme objectif principal celui de l’indépendance. Quitter le nid, m’installer avec mon copain, avoir mon propre appart’, gagner mon propre argent, m’acheter mes fringues et me payer le coiffeur étaient les principales cibles que j’avais en ligne de mire.
C’est quoi l’expression déjà ? Ah oui, ne pas voir plus loin que le bout de son nez.

At Last…

Le côté positif dans l’histoire c’est que ceux-ci au moins ont été amplement atteints puisque mon BTS en poche je ne suis pas restée plus de deux semaines inactive et ai rapidement enchaîné les CDI.

Et puis, il faut le dire, j’ai adoré mes 2 années de BTS. En effet, l’activité cérébrale intense nécessitée par la multitude de nouveaux apprentissages tranchait radicalement avec la mise en jachère subie par mes neurones pendant mon année de fac. Cette sensation était doublée du sentiment de me réaliser pleinement dans l’apprentissage d’un « vrai métier ». Ainsi, encadrée dans des apprentissages concrets, je me sentais à ma place. Sans parler des précieuses rencontres faites pendant ces deux années.

La suite n’a malheureusement pas toujours été à la hauteur en terme de réalisation personnelle, et c’est d’avantage au travers de mes autres « vies » et en particulier ma vie de chanteuse, que je trouvais l’épanouissement qui me manquait dans ma vie professionnelle. Je pense que sans cet autre pan de mon existence, et sans les opportunités professionnelles qui se sont présentées à moi (voir ici https://toutesmesvies.com/2019/11/11/i-love-my-job-now/), une reconversion se serait imposée.

Car voilà, ce choix de carrière n’était pas un choix de conviction ni un choix de coeur mais un choix de raison. Et même si aujourd’hui je n’ai aucun regret parce que j’ai fini par trouver un réel équilibre, ce ne fut pas sans peine et si c’était à refaire, si je devais m’adresser à la jeune Céline qui remplissait des dossiers d’inscription à l’issue de son année de fac, je lui dirais : fait ton choix en pleine conscience, et non en fonction de certains objectifs à courts termes ou certains aspects pratiques qui peuvent toujours être surmontés.

Vois plus loin, vois ce qu’il y a au fond de toi, réfléchis à ce que tu veux vraiment faire « de ta vie » et lance toi sans peur.

Parfois je me dis que c’est quand même dommage que ce ne soit qu’à 40 ans qu’on devienne capable d’avoir les raisonnements que l’on aurait du avoir à 20 !

Et vous ? Quelle est votre expérience en terme de choix professionnels ? Avez vous vraiment choisi ou c’est la vie qui a choisi pour vous ? Votre métier est il un plan B ? Avez vous des regrets ?

2 réflexions sur “Choix professionnels, choix de vie…

  1. Dans ma vie de maman, j’ai rencontré tellement de difficultés, accompagner mes petits, les guider, les aider, les soutenir et parfois m’énerver et ne pas comprendre leurs choix.
    De cette période, je ne garde qu’une conviction, faire confiance à nos enfants, les soutenir contre le système qui impose des règles sociétales rigides, les laisser tenter tout en parant les chutes et les désillusions. Les laisser choisir leur voie, voire leurs voies, les mettre en garde mais ne pas leur interdire ni juger, certaines voies sont de coeur et méritent d’être assorties d’un plan plus sûr mais pour autant il ne faut pas les négliger et tenter.
    Le plus important c’est de s’offrir le bonheur, et à notre époque, on peut se dire qu’on a le droit à plusieurs vies, les choix que l’on fait à 18ans ne nous condamnent pas à vie.
    Fais-toi confiance, fais lui confiance.

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